Mardi lecture
Mon quart d'heure féministe
Je vous ai déjà parlé de cette grande dame. J'ai lu tous ses livres et l'ai rencontrée cet hiver au sujet du dernier
«Tant que je saurai où demeurer, tant que je serai
accueillie en arrivant par le sourire de mes jardins, tant
que j'éprouverai si fort le goût de revenir et non celui de
fuir ; tant que la terre n'aura perdu aucune de ses couleurs,
ni la mer de sa chère amertume, ni les hommes de
leur étrangeté, ni l'écriture et la lecture de leurs
attraits ; tant que mes enfants me ramèneront aux racines
de l'amour, la mort ne pourra que se taire.
Moi vivante, elle ne parviendra pas à m'atteindre.»
Je finis aujourd'hui celui d'une autre dame d'un "certain âge" dont je pense avoir aussi lu tous les livres
L'enfer des femmes, c'est la vieillesse... , a méchamment conclu La
Rochefoucauld. C'est peut-être aussi une grâce : avoir la chance de
vivre longtemps peut permettre de profiter de soi, des autres, de la
nature, du plaisir de voir, de penser, d'exister, dans une sérénité
croissante. En fait vieillir vous précipite dans un monde jusque-là
inconnu - j'y suis ! C'est comme une nouvelle naissance qui force à
réapprendre l'usage de son corps, de son esprit, la gestion de ses
gestes, de ses horaires, jusqu'à ses moeurs. En renonçant à l'amour ?
Je crois au contraire que le certain âge , c'est l'âge de l'amour. Car
si tout passe, l'amour reste et même s'approfondit : qu'il soit actuel
ou souvenir, chaste ou pleinement vécu. Mes contemporaines, Claude
Sarraute, journaliste, Sonia Rykiel, créatrice de mode, Marguerite
Mazurier, agricultrice, Antoinette, ex-mannequin, me confient leurs
impressions sur notre voyage parallèle dans le temps, sa douceur et ses
cruautés... Un homme aussi, bien qu'encore jeune, a le courage de
s'exprimer sur ce que représente pour lui, danseur étoile, la venue de
l'âge : Patrick Dupond. Comme ils sont lucides et sincères ! Quel
bonheur de vieillir parmi de telles gens qui vous font partager le plus
fort de leur expérience de la vie qui passe - et, par là même, vous
repasse !